On appelle dojo la salle où nous nous entraînons. Mais dans la plupart des cas, l'entraînement se déroule dans une salle des sports. On voit souvent les karatéka saluer au seuil de la salle. A qui ou à quoi adressent-ils leur salut ? Face à eux se trouve souvent un panier de basket-ball près duquel d'autres sportifs peuvent être en train de jouer...


Je ne peux pas m'empêcher d'être choqué par cette situation car personnellement j'ai toujours cherché un sens aux actes de ma vie et la pratique du budo s'inscrit pour moi dans cette recherche permanente. J'ai voulu savoir le sens des kata car je ne voulais pas répéter des kata dépourvus de sens technique, ce qui m'a conduit à une recherche comparative sur les kata. Les résultats m'obligent à oser affirmer qu'un certain nombre de kata sont tellement déformés qu'ils n'ont aucun sens pour l'art martial, même s'ils ont une valeur chorégraphique.

Il est vrai qu'au Japon on salue au seuil du dojo, puis, parfois, à l'intérieur, à plusieurs reprises. Dans un dojo classique, on salue l'autel des dieux : dieu du dojo, dieu martial. Même pour ceux qui ne sont pas shintoïstes, l'acte de salut peut être un témoignage de respect envers le dojo où l'on s'entraîne avec sincérité, de respect envers le maître qui vous apprend des choses importantes, de respect envers les condisciples avec qui on s'entraîne... (Si l'on considère le salut au dojo dans un contexte religieux, de nombreux problèmes resteront non résolus et ambigus.). L'espace d'un vrai dojo facilite cet état d'esprit. Pour ceux qui s'entraînent dans un gymnase, il leur faut un effort de concentration pour construire l'ensemble de rapports que sous-entend un dojo.

Je pense que nous devons pouvoir construire cet état d'esprit quelle que soit la condition de l'espace. Mais, lorsqu'on salue, il est nécessaire de ne pas effectuer un geste comme un automate, ce qui va à contre sens du budo.

Les deux formes du salut.

En matière de salut, salut à la manière japonaise en inclinant le buste, dans un dojo il convient de distinguer au moins deux modes. L'un est un salut de respect ou de politesse, dans lequel on incline aussi la tête. L'autre est un salut envers le partenaire ou l'adversaire auquel vous devez manifester du respect, sans toutefois manquer de vigilance. En ce cas, vous ne devez pas le quitter les yeux pendant le geste du salut. Surtout dans le cas du combat, vous pouvez recevoir une attaque au moment où vous avez baissé le regard, puisque, selon la coutume du budo il s'agit d'une faute de votre part. Nous voyons pourtant fréquemment cette erreur lors de démonstrations ou de compétitions. Les adeptes japonais ont tendance à considérer qu'il s'agit d'une imitation imparfaite de la part des occidentaux et qu'on peut le tolérer parce qu'ils ne sont pas japonais. Je pense qu'une telle appréciation est fâcheuse. Il suffit de comprendre et de bien appliquer ces choses si simples.

Cependant, ceux qui comprennent que le salut avant le combat est la seule forme et saluent de cette manière dans le dojo, comme à l'extérieur, feront avec les meilleures intentions un geste offensif, désagréable pour l'autre et de ce fait, malpoli. Puisque le karaté est un art martial qui vient du Japon, il convient de connaître les deux formes de salut afin de les appliquer selon la situation.

Kenji TOKITSU

Source Académie Tokitsu-Ryu